Le cadre managérial : l’oublié du management d’équipe ?

[vc_row][vc_column][vc_column_text]Un des problèmes récurrents qui alimente la sous-performance au sein des organisations provient de la place de l’implicite dans le management des équipes. En effet, le management sous-estime l’importance de poser et reposer régulièrement un cadre managérial clair, précis qui permette à chacun de trouver sa place et concentrer ses efforts et sa motivation sur la performance opérationnelle. La plupart du temps, les managers et leurs équipes vivent dans la frustration mutuelle de ne pas se sentir entendus et ne pas comprendre pourquoi l’autre… ne comprend pas !

 

Une croyance limitante qui freine l’efficacité : confusion entre un mot et sa représentation 

Une des croyances les plus répondues françaises en France consiste à croire que parce que nous parlons tous la même langue, nous partageons alors le même langage et surtout la même représentation du monde. Nous ne prenons alors pas le temps de vérifier la compréhension de l’autre. Ce phénomène de dissonance est une des sources principales de tensions, voire de conflits potentiels et surtout à l’origine de pertes de temps considérables qui nuisent à l’efficacité individuelle et collective.

Dans un contexte interculturel nous travaillons traditionnellement via une langue commune (l’anglais en majorité) nous faisons encore l’effort de comprendre le référentiel et la culture de la personne, car nous savons que le même mot peut prendre diverses significations dans d’autres cultures nationales. Nous essayons donc de nous ajuster en permanence dans la relation pour « synchroniser » notre niveau d’information et de compréhension. Ce qui n’est généralement pas fait dans un contexte uniquement français ou l’illusion de la communauté de la langue crée un biais cognitif, un filtre que l’on retrouve régulièrement dans le management d’équipe : « Pas de besoin de lui dire, il le sait ! » « Je l’ai déjà dit en réunion, il devrait le savoir ! ». Rien ne garantit pourtant que cette même évidence soit présente dans l’esprit de l’autre. D’où une culture de l’implicite entretenue au quotidien.

Lors de l’arrivée d’un nouveau collaborateur, on fait seulement l’effort de présenter le cadre de travail et de l’organisation, mais très rapidement le poids des habitudes, des routines nous amène à ne pas plus ré-interroger l’implicite. Si le cadre « commun » est toujours bien compris et partagé, l’implicite devient alors roi dans ses terres et domine la plupart des relations.

 

Quelques principes empruntés aux théories de la communication systémique

  • La communication est toujours circulaire d’où l’importance du Feedback. Il permet de vérifier et d’ajuster le niveau d’information partagé. Le manager doit donc développer une culture du feedback suffisamment régulière et précise pour minimiser les risques d’incompréhension. Il doit donc assumer de « perdre ce temps» de clarification à court terme, pour en regagner à moyen et long terme. Le management est avant tout un investissement à long terme, souvent en contradiction avec les urgences opérationnelles du quotidien. On remet alors à plus tard les feedbacks, les réunions, etc. avec le risque grandissant de voir un simple malentendu devenir un conflit de personne.
  • C’est le récepteur qui donne sens au message. Il retraduit le message initial en fonction de plusieurs filtres. Une seule solution pour le manager : vérifier par le questionnement et la reformulation. Même si cela peut paraitre parfois un peu scolaire, le manager ne doit pas rester sur un « oui » qui peut avoir plusieurs sens:
  • Le récepteur a bien compris, mais a quand même filtré une partie du message
  • Un « oui » de politesse, de peur ou de soumission lorsque le récepteur n’ose pas dire « non » à son manager ou simplement avouer qu’il n’a pas compris
  • Le « cadre » de communication donne sens au message. La même information ne sera pas comprise de la même manière en fonction du cadre communicationnel: contexte, lieu, rôle, situations, etc. Donner la même information autour de la machine à café ou lors d’un entretien formel n’a pas la même signification ou le même poids. Mais prenons le temps de comprendre ce que l’on entend par le concept de « cadre »…

 

Le « cadre » managérial : « charpente » l’activité de l’équipe.

« Dans toute relation professionnelle, le cadre est l’ensemble des règles qui président à cette relation particulière ; il permet de la distinguer d’une autre, la constitue, lui conférant ses modes opératoires. » 1

 

Le cadre a une première fonction de délimitation. Il permet de définir ce qui fait partie de l’équipe (les activités, les objectifs, les process, les méthodes ou les outils spécifiques, etc.) et le « dehors » (les autres services, les clients, les fournisseurs, etc.). Le cadre participe donc à la création de l’identité de l’équipe, de son « imago ». Il en permet la formalisation et l’accès aux futurs membres de l’équipe. Pas d’inclusion réussie sans réflexion préalable et communication sur le cadre.

Une deuxième fonction du cadre est de servir de « charpente ». Il soutient et met en cohérence les activités des membres de l’équipe. Le cadre doit être suffisamment rigide et solide pour soutenir l’équipe et le travail en synergie, donner un repère commun, mais assez souple pour pouvoir s’adapter aux circonstances et évoluer en fonction du temps et des contraintes internes et externes. Il permet également de donner un sentiment de sécurité aux membres de l’équipe, il a une fonction de protection.

Le cadre de travail est donc un contenant qui délimite ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas dans l’espace de travail. C’est un ensemble de règles, de rituels et autres pratiques implicites ou explicites. C’est un dispositif spatial et temporel qui permet de structurer les interactions au sein d’un espace de travail.
Le « cadre » permet de définir ce qui est attendu vis-à-vis du collaborateur en termes de tâche, de comportement, ses droits et devoirs.

 

Le « cadre » managérial : fondation de l’équipe comme de l’organisation

Reprenons l’historique d’un travail collaboratif : pour toute construction d’équipe, l’enjeu principal consiste à passer d’une collection d’individus à une culture et une logique d’équipe. La difficulté réside alors dans la capacité du manager à faire « matcher », coïncider, converger les scenarios individuels en un scénario collectif suffisamment solide et clair pour que chacun puisse se sentir inclus dans l’équipe et que les efforts soient dirigés vers un but commun.

Le cadre a une fonction de « liant ». Il est même l’outil principal du manager, son filet de sécurité. Il permet cette logique du passage de l’individuel au collectif. Le manager et l’équipe doivent construire une « histoire commune ». Ce qui n’est pas sans difficulté, car chacun doit reconsidérer son cadre personnel qu’il a du mal à « lâcher » car c’est ce qui fait sens pour lui. Pourtant, tant que le cadre commun reste flou, les « jeux psychologiques » émergent, chacun risquant d’amener son référentiel et de négocier le cadre trop souple, prenant ainsi la main sur l’équipe. La formalisation du « cadre » est la première chose à travailler en collectif pour faciliter le travail en équipe et confirmer la place du manager-leader.

 

Quelques points clés pour mettre en place et faire vivre le cadre dans son équipe

  • Le manager est avant tout un porteur du cadre! Un « encadrant » qui doit le poser, le clarifier si besoin, en garantir le respect et le modifier, l’assouplir en fonction des contraintes internes et externes.
  • Pour manager correctement une équipe, il faut construire, au maximum avec l’équipe, le « cadre » de travail commun. En tant que collaborateur, je vais plus facilement intégrer et accepter le cadre si j’y ai contribué ou si je l’ai validé à un moment ou un autre.
  • Le cadre doit être suffisamment clair et précis pour que chacun puisse savoir quel rôle il doit jouer, quelle est sa place au sein de l’équipe.
  • Le manager doit poser clairement le « cadre » managérial dans son discours managérial (depuis son arrivée jusqu’à son départ) au moment des réunions collectives comme individuelles.
  • Il ne peut d’ailleurs se permettre de « recadrer », rappeler le cadre à un de ses collaborateurs, s’il n’a pas posé au préalable le cadre ! Encore une évidence mais malheureusement souvent oubliée dans la gestion d’équipe.
  • Mais poser le cadre une fois ne suffit pas ! C’est la répétition qui permet l’intégration du cadre et les « rituels managériaux» ont cette fonction de maintenir vivant le cadre managérial.

 

Et vous, quelles sont les caractéristiques de votre cadre de travail ?

 

1La notion de cadre est brillamment analysée par  dans leur article « C’est la marge qui tient la page. La question du cadre en supervision » Le grand Livre de la supervision. Isabelle Laplante et Nicolas De Beer, Ed. Eyrolles.

 

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Renaud WAKSELMAN est coach certifié et consultant en management et accompagnement du changement. Après avoir été responsable d’équipes dans le secteur du paiement en ligne, Renaud met son expérience de manager au service  de la formation et accompagnement d’opérationnels.

Intervenant partenaire EFE, il anime les formations  « Manager une équipe – Niveau 1 », « Manager une équipe – Niveau 2 » ainsi que « Concilier expertise et management ».[/dt_quote][/vc_column][/vc_row]